Une protection élargie pour les élus
Nous constatons que, depuis quelques années, la pression s’accentue sur les représentants du personnel, même dans les entreprises de moins de 500 salariés où, pourtant, la culture syndicale n’est pas toujours très présente. Malheureusement, dans certaines entreprises de cette taille la crise sanitaire « a bon dos » et sert de prétexte pour culpabiliser, voire menacer, quelques élus du personnel, même en l’absence d’appartenance déclarée à une organisation syndicale, quelle qu’elle soit.
Nous constatons également qu’il arrive de plus en plus souvent que ces élus, qui se sentent « dans le collimateur », subissent des situations quotidiennes extrêmement inconfortables, au regard de l’évolution de leurs propres conditions de travail. Ils expriment le sentiment subjectif d’être victimes de harcèlement ou de discrimination. Les gros mots sont lâchés… A tort ou à raison ? C’est toute la question. Prenons du recul et examinons la problématique d’un point de vue strictement juridique…
En cette matière (y a-t-il harcèlement ou discrimination envers un représentant du personnel ?) le droit du travail est en train d’évoluer de manière spectaculaire, dans le sens du renforcement de la protection des représentants du personnel, élus au second tour ou officiellement syndiqués.
La jurisprudence de la chambre sociale de la cour de cassation a formulé encore récemment des précisions intéressantes que nous développerons dans les éditos à venir sur le blog de DEFIS CE. Voici un premier niveau d’analyse.
Prenons l’hypothèse du licenciement d’un représentant du personnel autorisé par l’inspection du travail. Le motif juridique du licenciement est nécessairement « politiquement correct », sinon, l’inspection du travail ne l’aurait pas autorisé. Rappelons que pour les salariés protégés, l’employeur est tout simplement dépossédé de la décision de licencier, soit le licenciement est « autorisé », soit il ne l’est pas. C’est donc un fonctionnaire qui « assume » la décision de licencier un salarié d’une association ou d’une entreprise privée.
Depuis quelques années, le motif politiquement correct invoqué est souvent l’inaptitude du salarié protégé, inaptitude que seul le médecin du travail est habilité à prononcer.
Nous voyons malheureusement se multiplier les licenciements pour inaptitude dans des cas où le salarié (protégé ou non) a été placé dans une situation professionnelle quotidienne telle qu’il est tombé malade (dépression, burn-out, à défaut de vocabulaire médical plus précis qui n’est pas de notre compétence). Autrement dit, il arrive que certains salariés soient poussés à bout de leurs ressources psychiques et « finissent » par « accepter » une « sortie » en inaptitude pour échapper à un contexte professionnel devenu toxique.
Excusez-nous de l’abus des guillemets, nous souhaitons juste reproduire un vocabulaire « corporate » auquel nous n’adhérons pas le moins de monde mais qu’au contraire nous combattons en affirmant la réalité d’une profonde souffrance psychologique qu’il tente maladroitement de masquer.
Après ce long exposé du contexte, voici deux règles importantes qu’affirme désormais de manière extrêmement claire la cour de cassation.
1/ Il n’appartient pas à l’inspection du travail de rechercher les causes de l’inaptitude déclarée par la médecine du travail, y compris dans l’hypothèse d’un contexte toxique qui pourrait (sous réserve de l’existence d’un dossier lourd) recevoir les qualifications juridiques de harcèlement ou de discrimination.
2/ En revanche, l’autorisation de licenciement donnée par l’inspection du travail n’empêche pas que ce salarié protégé fasse valoir devant le Conseil de Prud’hommes tous les droits résultant de l’ORIGINE de l’inaptitude lorsqu’il l’attribue à un MANQUEMEMENT DE L’EMPLOYEUR A SON OBLIGATION DE SANTE-SECURITE.
Autrement dit, la cour de cassation (chambre sociale) a initié une nouvelle jurisprudence qui reconnait à un salarié protégé, pourtant licencié après autorisation de l’inspection du travail, le bénéfice des droits suivants :
- Indemnité compensatrice de préavis (qui est supprimée en cas de licenciement pour inaptitude)
- Dommages et intérêts pour licenciement abusif
- Dont le montant peut s’affranchir et dépasser les barèmes MACRON, compte tenu de circonstances particulières qui justifieraient les qualifications juridiques de harcèlement ou discrimination
Nous développerons les différents aspects de ces problématiques lors des prochains éditos du BOLG de DEFIS CE, aussi bien pour le cas des salariés protégés que pour celui des salariés non protégés, victimes des mêmes agissements illégaux.
Nous développerons également les récentes évolutions de la jurisprudence sur l’intensité de l’obligation qui incombe à l’employeur de protéger la santé-sécurité des tous les travailleurs.
Comment le CSE peut-il agir et réagir devant ces situations, notamment le harcèlement moral ou sexuel et les agissements sexistes ?
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